Ces anciennes gravières situées le long de la Marne constituent une bonne idée de sortie ornithologique non loin de Paris.
Historique
Situation de la réserve naturelle régionale du Grand-Voyeux (Seine-et-Marne). Carte : Ornithomedia.com |
Ancienne terre agricole (l'une des parcelles s'appelle "Les Pâtis", ce qui témoigne de l'existence ancienne de prés et de pâtures), le Grand-Voyeux a été transformé en carrière dès 1973 : le sous-sol, composé d'alluvions, contient en effet une grande quantité de sable et de graviers. Progressivement, les secteurs exploités par les carriers ont été abandonnés, et la nature a recolonisé l'espace ainsi libéré. L’extraction des matériaux a créé des plans d’eau, accentuant ainsi la vocation de zone humide de ce secteur de la vallée de la Marne.
En 1995, lors d'une enquête publique relative à l'extension des carrières, un habitant de Congis-sur-Thérouanne (Seine-et-Marne) a déposé un projet d'aménagement et de réhabilitation de cette zone humide de 242 hectares pour y préserver la flore, notamment les roselières, et la faune (oiseaux, mammifères, batraciens, insectes) avec une attention particulière pour les oiseaux migrateurs et sédentaires.
Un partenariat entre associations, collectivités locales et institutions scientifiques
Accepté par le commissaire enquêteur, ce projet l'a ensuite été par la municipalité de Congis-sur-Thérouanne et, rapidement, il a été soutenu par le conseil régional d'Île-de-France, le conseil général de Seine-et-Marne et la communauté de communes des Pays de l'Ourcq. De leur côté, les sociétés de granulats alors actives sur le site, Capoulade et Morillon-Corvol, ont aussi accepté ce projet.
L'Association pour la Valorisation des Espaces Nature (AVEN) du Grand-Voyeux a été créée en 1996 dans le but de faire connaître la potentialité de ces milieux et leur richesse avifaunistique. En 1999, l'Agence des espaces verts de la région Île-de-France est devenue le maître d'ouvrage du projet et a dirigé les opérations d'acquisitions foncières et d'aménagement du site.
Toutes ces structures sont devenues les partenaires du projet et ont participé aux différents financements avec l'Agence de l'Eau Seine-Normandie.
D'autres partenaires, comme la DIREN, le Muséum d'histoire naturelle ont contribué à la réussite du projet par l'apport de leurs connaissances scientifiques.
Des aménagements passés et futurs
L'étang Bougrandeuse, l'un des plans d'eau de la réserve naturelle régionale du Grand-Voyeux (Seine-et-Marne). Source : AVEN du Grand-Voyeux |
En 1999, l'aménagement du site est réalisé sous la maîtrise d'ouvrage de l'Agence des Espaces Verts de la Région Ile-de-France. Le carrier qui exploitait le site a effectué de gros travaux de terrassement (plusieurs dizaines de milliers de mètres cubes de terre déplacés), visant notamment à créer des pentes douces et à augmenter le linéaire des berges des plans d'eau.
Deux études ont été commandées au bureau d'études Ecosphère.
De nombreux projets d'amélioration des habitats ont déjà été menés ou sont en cours, comme un amorçage de la végétation pour favoriser la constitution de prairies plus ou moins humides, la mise en place d'une gestion des milieux (par exemple un rajeunissement par fauche et par creusement des roselières pour éviter son envahissement par les saules) et d'équipements de gestion de l'eau...
Un partenariat a été signé avec un agriculteur pour la mise en place d'un pâturage extensif avec des moutons de race solognote.
Deux observatoires ont été construits (une dizaine serait prévue à terme), et une signalétique et un sentier de découverte sont en cours de réalisation.
Les actions de l'AVEN du Grand-Voyeux
L’AVEN du Grand-Voyeux (Grandvoyeux.fr) mène des missions d’animation et de suivi scientifique dans la réserve naturelle régionale. Ses animateurs salariés assurent l’encadrement des sorties publiques proposées par l’Agence des Espaces Verts et des sorties organisées sur demande pour les scolaires (avec ateliers pédagogiques) ou les groupes constitués. Elle propose également des sorties (une douzaine dans l’année) encadrées par ses administrateurs à l’intention exclusive des adhérents, et participe activement aux événements locaux ou nationaux : comptage Wetland en janvier, journées mondiales des zones humides recensements "RAMSAR" en février, Fête de la Nature en mai, "Balades de Congis" en juin, Journées du Patrimoine en septembre...
Des étangs alimentés par les eaux souterraines
Le sous-sol du Grand-Voyeux est constitué d'alluvions, c'est-à-dire essentiellement de sable et de graviers. Ces matériaux sont perméables et permettent la circulation de l'eau de la nappe souterraine de la Marne (nappe alluviale). Il existe aussi une nappe perchée (plateau du multien) qui alimente les plans d'eau les plus éloignés de la rivière. Ces alimentations en eaux souterraines sont capitales pour l'intérêt des milieux humides reconstitués.
La végétation
Vue de la réserve naturelle régionale du Grand-Voyeux (Seine-et-Marne) (cliquez sur la photo pour l'agrandir). Photographie : Gérard Brunot |
La flore actuellement présente dans le domaine du Grand-Voyeux s'est installée spontanément sur des sols bouleversés par les travaux des carriers. Des espèces peu communes ont été notées comme le Scirpe épingle (Eleocharis acicularis) et l'Hottonie des marais (Hottonia palustris).
Une mosaïque de milieux s'est mise en place :
- Les anciens bassins de décantation abandonnés depuis plusieurs années, offrent un sol meuble, constitué de particules très fines d'argile ou de limon. Les grands hélophytes, comme le roseau (Phragmites australis), forment des peuplements denses (roselières). Année après année, les tiges et feuilles mortes des roseaux s'accumulent et tendent à assécher la roselière: les saules s'installent alors, préfigurant une évolution vers des milieux forestiers.
- Les sols abandonnés plus récemment, sur des surfaces plates, proches de la surface de l'eau et noyés une partie de l'année (les grèves) présentent une végétation dite pionnière assez originale : les plantes du genre Bidens, dont les fleurs ressemblent à celles des marguerites, mais sans les (faux) "pétales" blancs, sont caractéristiques de ces formations végétales. On trouve également des plantes originales comme l'Éléocharis aiguille (Eleocharis acicularis), une espèce rare qui forme une sorte de gazon très fin, et le Souchet brun (Cyperus fuscus) cousin des papyrus. En l'absence d'intervention humaine, cette végétation pionnière sera progressivement remplacée par les roseaux et les saules.
- Sous la surface de l'eau, une végétation spécifique s'est installée : ce sont les herbiers aquatiques où vivent de très nombreux petits animaux (des insectes comme les larves de libellules et autres dytiques, des escargots d'eau comme les Limnées, des larves d'amphibiens comme les têtards...). On y trouve des plantes comme la Myriophylle en épis (Myriophyllum spicatum), la Renoncule aquatique (Ranunculus aquatilis) et l'Utriculaire (Utricularia vulgaris), qui s'est beaucoup développée au cours de ces dernières années et dont la particularité est d'être carnivore (elle se nourrit de très petits organismes comme les daphnies).
- Les sols plus élevés, jamais noyés ou seulement très ponctuellement en hiver, sont d'abord colonisés par une végétation discontinue, avant d'évoluer vers des milieux comme des prairies ou des friches. En l'absence d'intervention humaine, ces prairies ou friches évolueront à leur tour vers la forêt de feuillus.
- Les boisements au nord du site et le long de la Marne sont assez diversifiés : chênaie-charmaie, saules et aulnes lorsque les sols sont plus humides, fruticées à aubépines et prunelliers, peupleraie artificielle.
Accès
Carte de la réserve naturelle régionale du Grand-Voyeux (Seine-et-Marne) : en rouge, le sentier ouvert au public longeant la zone protégée. Carte : Ornithomedia.com d'après AVEN du Grand-Voyeux |
Depuis Paris, il faut prendre l'autoroute A4 au niveau de la porte de Bercy en direction de Metz/Nancy. Sortir à Meaux (ou prendre la RN3 à Pantin en direction de cette ville).
À Meaux, prendre la direction de Soissons par la D 405. À Varreddes, suivre la direction de Congis-sur-Thérouanne. Dans ce village, se diriger vers les Isles-les-Meldeuses. A la sortie de Congis (300 mètres plus loin), prendre à droite un chemin en gravillons.
L'entrée de l'Espace Naturel Régional est fermée par une grille, mais un chemin public (tracé rouge sur notre carte) longe la réserve par le nord et offre de bons points de vue sur les plans d'eau et les roselières. Un observatoire est en outre libre d'accès.
Un second observatoire, beaucoup plus vaste, est aménagé au sein de la partie à accès limité. S’y ajouteront prochainement (2014-2015) deux aménagements prévus dans le cadre du projet de l’Agence des Espaces Verts : un sentier de découverte et une maison de la Réserve.
Une avifaune riche
La réserve naturelle du Grand-Voyeux est composée d'une mosaïque d'habitats : étangs, mares, vasières, roselières, saulaies, boulaies, zones boisées et pâtures. D'autre part, la vallée de la Marne représente une voie de migration suivie par les oiseaux venus de l'est et du nord de l'Europe ou, au printemps, d'Afrique. Ces deux facteurs expliquent l'extraordinaire diversité de l'avifaune observée sur le site (plus de 201 espèces déjà notées, dont près d'un tiers sont nicheuses).
Les oiseaux nicheurs
Roselières dans la réserve naturelle régionale du Grand-Voyeux (Seine-et-Marne) (cliquez sur la photo pour l'agrandir). Photographie : Gérard Brunot |
Les roselières sont l'un des milieux les plus précieux du domaine, et des oiseaux rares ou peu communs en Île-de-France s'y reproduisent, comme le Blongios nain (Ixobrychus minutus) un à deux couples nicheurs ponctuels, le Busard des roseaux (Circus aeruginosus) un couple depuis 2010, la Gorgebleue à miroir (Luscinia svecica) quelques couples, le Râle d'eau (Rallus aquaticus), la Rousserolle effarvatte (Acrocephalus sciparceus) et le Bruant des roseaux (Emberiza schoeniclus).
La Rousserolle turdoïde (Acrocephalus arundinaceus) a niché jusqu'en 2001, année où une inondation a bouleversé la roselière. L'espèce n'avait pas été revue jusqu'au printemps 2006, quand un chanteur s'est manifesté durant tout le mois de mai. Toutefois, elle est régulièrement observée en migration, comme le Héron pourpré (Ardea purpurea) : ces deux espèces ne seraient-elles pas en train de « prendre leurs marques » sur le site, comme l'a fait le Busard des roseaux il y a quelques années avant de s'installer ? Des chanteurs de Phragmites des joncs (Acrocephalus schoenobaenus) ont déjà été entendus au printemps dans le passé, et là aussi le futur pourrait réserver une bonne surprise...
Les étangs peu profonds colonisés par des herbiers aquatiques sont d'une grande importance puisqu'ils offrent une nourriture végétale et animale abondante à plusieurs nicheurs comme le Grèbe castagneux (Tachybaptus ruficollis), le Grèbe huppé (Podiceps cristatus), la Foulque macroule (Fulica atra), la Gallinule poule-d'eau (Gallinula chloropus) ou le Martin-pêcheur d'Europe (Alcedo atthis).
Quelques adultes de plusieurs espèces de canards sont présents sur le site au printemps et pourraient également se décider à nicher. Il s'agit en particulier de la Sarcelle d'hiver (Anas crecca) et des Fuligules milouin (Aythya ferina) et morillon (A. fuligula).
La Sterne pierregarin (Sterna hirundo) se reproduit parfois au printemps sur des îlots artificiels créés par l'Agence des Espaces Verts de la région Île-de-France. Des Mouettes rieuses (Chroicocephalus ridibundus) construisent aussi leurs nids sur certains étangs.
Les parties herbacées sont maintenues rases par un troupeau de moutons solognots afin de contribuer au maintien de l’Œdicnème criard (Burhinus oedicnemus), espèce pionnière typique des anciennes sablières.
Les parties forestières au nord du site favorisent l’installation de certaines espèces moins inféodées aux zones humides : Faucon hobereau (Falco subbuteo), Milan noir (Milvus migrans), Rossignol philomèle (Luscinia megarhynchos), Loriot d’Europe (Oriolus oriolus) et Tourterelle des bois (Streptopelia turtur).
Gorgebleue à miroir (Luscinia svecica), réserve naturelle régionale du Grand-Voyeux (Seine-et-Marne). Photographie : Romain Huchin |
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Sternes pierregarins (Sterna hirundo) adultes, réserve naturelle régionale du Grand-Voyeux (Seine-et-Marne). Photographie : Romain Huchin |
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Busard des roseaux (Circus aeruginosus), réserve naturelle régionale du Grand-Voyeux (Seine-et-Marne) (cliquez sur la photo pour l'agrandir). Photographie : Gérard Brunot |
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Oedicnème criard (Burhinus oedicnemus), réserve naturelle régionale du Grand-Voyeux (Seine-et-Marne). Source : AVEN du Garnd-Voyeux |
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Les oiseaux migrateurs
Le site du Grand-Voyeux est situé sur une voie de migration importante, le long de la Marne, et parfois des migrateurs inattendus pour la région parisienne peuvent y être observés, comme ce Tournepierre à collier (Arenaria interpres). Source : Aven du Grand-Voyeux |
Le site s’affirme également comme une halte privilégiée aux périodes de migrations (printemps et automne). En particulier, une grande diversité de limicoles, parfois peu courants en Ile-de-France, fréquente les rives des plans d'eau : Chevalier culblanc (Tringa ochropus), Chevalier gambette (Tringa totanus), Bécasseau variable (Calidris alpina) ou encore Petit gravelot (Charadrius dubius) de façon régulière, Chevalier arlequin (Tringa erythropus), Combattant varié (Philomachus pugnax), Barge à queue noire (Limosa limosa) ou Avocette élégante (Recurvirostra avosetta) occasionnellement ou de façon exceptionnelle, comme l'Echasse blanche (Himantopus himantopus) (deux individus début mai 2012, quatre individus le 6 juin 2013), le Tournepierre à collier (Arenaria interpres) (un individu le 10 mai 2013) ou le Bécasseau minute (Calidris minuta) - 1 individu du 21 au 24 septembre 2012.
Les étangs sont visités par des oiseaux de passage intéressants comme le Balbuzard pêcheur (Pandion haliaetus), en avril et à la fin de l'été, la Guifette noire (Chlidonias niger), la Mouette mélanocéphale (Larus melanocephalus) ou la Sarcelle d’été (Anas querquedula).
En octobre, des petites troupes d'Oies cendrées (Anser anser) font parfois une halte, et des Grues cendrées (Grus grus) survolent de temps en temps le site. Le Grèbe à cou noir (Podiceps nigricollis) est un migrateur rare. Le Canard pilet (Anas acuta) est régulièrement en stationnement sur le site à la fin de l’hiver.
Des espèces non directement liées aux zones humides peuvent être vues aux passages comme la Pie-grièche écorcheur (Lanius collurio), le Merle à plastron (Turdus torquatus) ou le Traquet motteux (Oenanthe oenanthe). De nombreux passereaux fréquentent alors les haies (pouillots, fauvettes) et les prairies (pipits).
Sarcelle d'hiver (Anas crecca), réserve naturelle régionale du Grand-Voyeux (Seine-et-Marne). Photographie : Romain Huchin |
Les oiseaux hivernants
Les grands étangs, souvent assez profonds, sont très utilisés par les oiseaux hivernants, notamment par les canards plongeurs comme les Fuligules morillon (Aythya fuligula) et milouin (Aythya ferina) et les canards de surface dont le Canard colvert (Anas platyrhynchos), le Canard chipeau (Anas streptera) et la Sarcelle d'hiver (Anas crecca). Les canards siffleurs (Anas penelope) apprécient les prairies en bordure d’étangs. Quelques Garrots à œil d’or (Bucephala clangula) et Harles piettes (Mergullus albellus) sont observés chaque année.
Les Laridés se rassemblent aussi durant la saison froide, essentiellement la Mouette rieuse et les Goélands leucophée (Larus cachinnans), argenté (L. argentatus) et brun (L. fuscus), formant des dortoirs sur les plans d'eau.
Le Butor étoilé (Botaurus stellaris) est un hivernant régulier, visible dès le mois d'octobre. Ce discret héron paludicole se laisse parfois observer en bordure des roselières lorsque les étangs sont gelés.
Des passereaux nordiques comme les Grives litorne (Turdus pilaris), la Grive mauvis (Turdus illiacus), ou plus occasionnellement le Sizerin flammé (Carduelis flammea) sont alors à rechercher.
D'autres animaux
Le site du Grand-Voyeux présente un intérêt particulier pour les odonates (plus de 30 espèces recensées) et les amphibiens avec la présence du Pélodyte ponctué (Pelodytes punctatus) et du Triton crêté (Triturus cristatus) notamment. La Couleuvre à collier (Natrix natrix), reptile inféodé aux zones humides, est présente sur le site.
Les grands étangs, souvent assez profonds, sont très utilisés par les oiseaux hivernants, notamment par les canards plongeurs comme les Fuligules morillon (Aythya fuligula) et milouin (Aythya ferina) et les canards de surface dont le Canard colvert (Anas platyrhynchos), le Canard chipeau (Anas streptera) et la Sarcelle d'hiver (Anas crecca). Les canards siffleurs (Anas penelope) apprécient les prairies en bordure d’étangs. Quelques individus de Garrot à œil d’or (Bucephala clangula) et Harle piette (Mergullus albellus) sont observés chaque année.
Les Laridés se rassemblent aussi durant la saison froide, essentiellement la Mouette rieuse et les Goélands leucophée (Larus cachinnans), argenté (L. argentatus) et brun (L. fuscus), formant des dortoirs sur les plans d'eau.
Le Butor étoilé (Botaurus stellaris) est un hivernant régulier, visible dès le mois d'octobre. Ce discret héron paludicole se laisse parfois observer en bordure des roselières lorsque les étangs sont gelés.
Des passereaux nordiques comme les Grives litorne (Turdus pilaris), la Grive mauvis (Turdus illiacus), ou plus occasionnellement le Sizerin flammé (Carduelis flammea) sont alors à rechercher.